Les chinois et les extraterrestres (tài kōng rén)
Posté par etaliens le 17 septembre 2013
Les récits de A jùn mǎ 俊 马 tale de François de la Chevalerie
«Le ciel est ouvert à ceux qui ont des ailes – Alta alatis patent »
Locution latine
« Rien dans l’univers ne saurait résister à un nombre suffisamment grand d’intelligences groupées et organisées »
Pierre Teilhard de Chardin
Hier s’est tenue la réunion mensuelle du club d’astronomie de Tianjin a luniversite de Tianjin (Tianjin Dàxué 天津大学).
Tout juste de retour de France, j’ai pris discrètement place dans l’hémicycle. L’assemblée était organisée en cercle autour d’une petite estrade.
Le public, pour la plupart des hommes âgés issus pour l’essentiel du Département de Physique Chimie de l’Université de Tianjin.
La règle est la suivante : lorsque l’un d’entre nous souhaite prendre la parole, il monte l’estrade. Seule celle-ci est éclairée. La lumière glisse alors avantageusement sur l’orateur donnant une intensité dramatique à son intervention.
Du haut de ses quatre vingt ans, Monsieur Li, ancien Directeur du département de physique de l’université de Tianjin, aujourd’hui Président du Club, lance le débat (lùn zhàn 论战).
Le regarde sévère, il s’offusque d’abord des informations récentes parues dans la presse, un florilège d’invraisemblance : un extraterrestre trouvé congelé, une base extraterrestre dans l’Himalaya, des hallucinations diverses, etc.
- Avons nous aboli définitivement aboli notre capacité de jugement ? se demande-t-il. Sommes nous sujets à des lubies ou sommes maîtres de nous mêmes ? Les « sciences célestes » produisent chez les Chinois une certaine confusion entre l’essentiel et l’accessoire, admet-il. L’homme chinois serait-il plus vulnérable à la rumeur céleste que tout autre citoyen du monde ?
- Oui ! s’exclame sentencieusement Monsieur Zhang, un Docteur en Physique Nucléaire. Notre passé a trop longtemps été bercé par les rêveries de nos empereurs. Les dirigeants de la dynastie des Zhou ne portaient-ils pas le titre de « Fils du Ciel » (天子) ? N’exerçaient-ils pas un pouvoir absolu sur toutes les affaires, petites ou grandes, qui se déroulaient sous le Ciel (天下) ? Les empereurs, ne déployaient-ils pas une énergie colossale pour s’enquérir des affaires du ciel ?
Madame Zhao, une femme rondelette portant bien la cinquantaine, rejoint l’estrade.
- Nous allons chercher bien loin les extraterrestres, loin dans les cieux mais peut être sont-ils seulement présents parmi nous selon des formes que n’osons imaginer. Nullement travesti en homme mais subsistant selon des fils de vie invisibles et indétectables. Peut-être nous regardent-ils intensément, s’amusant de notre ignorance, de notre bêtise, moquant notre arrogance.
- Tu as raison ! reprend Monsieur Hao, une des figures du club et à la longue barbe blanche, la seule affirmation objective sur les extraterrestres, c’est ce que nous ne les voyons pas et que nous ignorons tout d’eux !
- Que doivent-ils penser de nous alors ? s’interroge Monsieur Ma, de l’ethnie Hui. Il est vrai que pour toute autre forme de vie douée d’une vraie raison, pas celle confuse dans laquelle on nous entretient, nous sommes archaïques ! Voyez donc la société où l’on vit ! Ne nous laissons par trop abuser par l’argent, l’ambition et le pouvoir ! Si d’aventure les extraterrestres existent, je souhaite qu’ils aient inventé l’intelligence.
- Peut-on parler d’intelligence ? A-t-on seulement besoin de cela pour vivre ? remarque Madame Zhao.
- Ce qui est sûr, c’est que la civilisation chinoise est infestée par la présence rampante et insolente des extraterrestres, poursuit Monsieur Zhang. Rappelez vous seulement que lors de la dynastie Xia généralement considérée comme la première dynastie chinoise (2205 à -1767), nos ancêtres auraient, dit-on, des caractéristiques physique étranges comme de grands yeux dévorant tout l’espace.
- Quand je traverse les rues de Tianjin, lâche discrètement Monsieur Yang, un ingénieur chimiste, je me demande parfois d’où viennent tous ces gens. De provinces lointaines ? De l’autre côté des montagnes ? Ou plus encore d’une planète qui nous serait inconnue ?
Surgit John, un américain, professeur de physique, soixantaine bedonnante et légèrement illuminé. Il a écrit un opuscule contesté : « L’extraterrestre, la trame de la civilisation chinoise ».
- L’unicité culturelle en chine, n’est-ce pas une merveilleuse armure pour résister aux invasions, à l’usure du temps ? Ce don ne lui a t-il pas été donné par le ciel ? L’être chinois ne serait-il pas de double dimension, terrestre et extraterrestre ?
- Vous être bien aimable, s’exclame Monsieur Li. Mais mieux vaut mieux s’en tenir au fait scientifique !
- Le plus grand astronome chinois, Zhāng Yùzhé (张钰哲) a dédié sa vie à l’étude des astres, tout cela pour qu’un misérable cratère lunaire porte son nom ! se lamente Monsieur Zhang, Ne pourrions nous pas envisager une solution plus simple ?
- Contentons de nous de ce qui est possible ! interrompt une belle jeune femme répondant au nom de Cuicui, toute nouvelle recrue du Club. Je pense que l’extraterrestre est une évolution de nous même. Nous le convenons distinct de nous mais peut être est il simplement notre prolongement ? Un jour on se demandera pourquoi a-t-on pu croire aussi longtemps aux extraterrestres alors qu’ils n’étaient qu’une partie en devenir de partie de nous même, notre aboutissement.
- Et vous Junma, qu’en pensez vous ? me demande Monsieur Li. Comme j’étais fatigué par le voyage, j’articulais difficilement mes phrases, le mot hésitant.
- Je pense à un homme qui a vécu à Tianjin, paléontologue et théologien, Pierre Teilhard de Chardin. Pour lui, « le phénomène humain » doit être pensé comme étant à un moment donné une étape de l’évolution qui nous conduira à l’avènement du Christ Cosmique. L’humanité se rassemblera alors en un hypothétique point oméga représentant de facto, « et sans tristesse aucune », la fin du Temps. Dans ce cas, nul besoin, nulle présence d’extraterrestre.
- Hum ! murmure Monsieur Li. Cessons là nos commentaires, redevenons de prosaïques humains, dit-il en nous faisant découvrir une bouteille d’alcool blanc (baijiu) à base de riz et livré à 48 degrés.
Badinant alors sur les choses diverses, je parlais longuement avec Cuicui, de sa vie, de ses désirs.
Publié dans Les chinois et les aliens, Les chinois et les extraterrestres | Pas de Commentaire »